Pour comprendre aujourd’hui, j’aime utiliser les rétroviseurs, ils sont les outils parfaits pour ce coup d’oeil dans le passé.
Alors je ne suis pas historienne, pas sociologue et surtout je ne prétends pas t’offrir ici l’histoire complète du scrap en France.
Je suis juste un dinosaure …. Un dinosaure qui était là quand l’histoire du scrap a commencé dans sa version française. Aujourd’hui, je vois une nouvelle génération créer les contours d’un scrap à la française.
Et je me sens fière d’avoir été de ces pionnières qui ont cru au scrap, qui ont œuvré et qui continuent à le faire. Aujourd’hui encore, je me rappelle le premier jour où le scrap est entré dans ma vie, il était révélation. Le souvenir est vivace…
Petit préalable si tu ne sais pas ce qu’est le scrap.
Le scrap est rangé dans les loisirs créatifs. Il est coincé entre les collages, peintures, tampons et tout ce qui touche au monde du papier.
Il est vaste : carterie, création de page avec ou sans photo, album photo, home déco , art journal.
Il est liberté créative et peut se vivre avec presque rien. Même si nos « scraproom » débordent souvent de matériels.
Je te parle de ce qu’est le scrapbooking, non pas dans une approche matérielle mais bien dans ses atouts & bénéfices dans cet article : A quoi sert le scrap ?
Je t’embarque donc pour ce voyage en 5 escales dans une histoire du scrap, version française.
1 Le scrap européen ou dit azza
2 L’arrivée du scrap américain
3 L’âge d’or des forums, naissance d’une communauté
4 La diversification des styles et des applications du scrap
5 Et aujourd’hui?
1 Le scrap européen ou dit Azza
« Oser découper tes photos »
La première page de scrap dans mes albums photos date de 1999, sans doute réalisée en 2000/2001.
Waouh 20 ans déjà !
Et sans surprise, c’était du scrap européen!
Quesako ? y a-t-il un scrap par pays ?
Alors je ne sais pas pourquoi il a pris ce nom. Il est représenté par la marque AZZA.
La marque et ce type de scrap existent toujours. Il consiste à appliquer des pochoirs de découpe sur une photo ou un fond de page. On obtient des découpages géométriques.
Les papiers de l’époque sont essentiellement unis et il y a très peu de motifs à disposition.
Le matériel est encore très limité et empreinte plus aux autres disciplines des loisirs créatifs.
Le scrapbooking qui débarque en France est en fait le résultat de la transformation d’un scrap ancien présent aux Etats-Unis.
Depuis le XVIII, le scrap s’est développé outre atlantique dans la communauté des mormons. C’est plus particulièrement un scrap religieux. Or en 1980, un livre est écrit par une mormone Marielen Christiansen « Keeping Memories Alive ». Il va donner au scrap une perspective qui ne sera plus alors uniquement religieuse mais celle de faire mémoire de nos vies.
C’est le début de l’ère moderne du scrap. Aux Etats-Unis, le succés va être rapide et immédiat. Et il va se dévélopper en dehors des communautés religieuses.
Quant à moi, après un premier accueil de ce type de scrap dit européen, je me sens vite limitée. Le cadre offert par le scrap européen ne me permet pas d’explorer ma créativité.
Le matériel reste dans les tiroirs. L’intérêt est retombé.
2 le scrap américain déferle en France
Il y a ce matin où je choisis d’être infidèle à ma boulangerie pour aider l’ouverture d’une nouvelle enseigne. Je franchis la porte et en attendant d’être servie, je m’attarde sur les magazines en vente.
Et oui, c’était un multi commerce pour essayer de percer et attirer la clientèle.
Et là …. Oh comme le souvenir est encore si présent … je vois un magazine à la couverture attrayante, tout en rose et vert, à l’unisson du printemps. Et je vois sur cette première de couverture
une photo mise en valeur par un scrap que je ne connaissais pas encore
mais dont je sais que lui et moi, nous nous étions alors trouvés,
définitivement .
C’était Idées de scrap n°3.
Le scrapbooking s’installe dans la paysage français
C’est un magazine, puis deux destinés au scrap
C’est une école du scrap qui voit le jour à Lyon avec la regrettée Marie-Dominique Gambini.
Il y a aussi des petits livres techniques que l’on trouve désormais pour notre apprentissage.
Ce sont les produits qui arrivent, nombreux, variés comme des cadeaux de Noel qui ne cessent d’agrandir la famille du matériel de scrap.
C’est l’euphorie des découvertes.
Dans les magasins spécialisés, le scrap commence à prendre place comme tel. Dans ma petite commune, en banlieue de Nancy, une boutique voit le jour en 2005 : SCRAP’ATO L’ATELIER DE L’OURS. Il y a du matériel et des ateliers qui sont proposés.
Dans la majorité des cas, les produits sont américains. Les design sont aussi américains.
Les inspirations sont aussi très américaines.
Bref nous sommes « sous influence » !
3 L’âge d’or des forums, naissance d’une communauté
Et nous avions aussi « la scrappeuse de l’année. »
Et oui, chaque année, un magazine très prisé par notre petit monde « Entre Artistes » organisait le concours de la scrappeuse de l’année. Cela mettait notre communauté en émoi. Nous faisions nos pronostics en pensant aux talents qui avaient émerger durant l’année.
Mais cela c’est prendre un peu d’avance sur mon histoire.
Notre communauté a eu la chance de naître avec l’arrivée de l’internet.
Nous vivions alors le scrap de manière souvent isolée en France. Et la fée internet s’est penchée sur notre berceau: des blogs sont nés, des forums ont réunis des scrappeuses.
En cela nous imitions notre grande sœur américaine. Il y avait un forum américain, immense source d’inspirations et de talents, là bas. Il y avait des marques qui commençaient à se démarquer aussi.
Chez nous, un des forum suscitait l’envie : la manufacture.
C’était un forum sur parrainage par un des membres et limité en nombres de places. Il a réuni les plus beaux talents des débuts du scrap. Mais il gardait son caractère secret. Les scrappeuses de ce forum sont aujourd’hui des créatives très actives dans le scrap ou sur un autre support créatif. Il a vraiment été un incubateur de talents.
Pour les autres, comme moi , il restait à créer ou trouver d’autres forums.
Le bien, celui de mon apprentissage et des amitiés fidèles m’attendait depuis déjà un an ! Le forum Clean & simple, tout simplement, crée par Ingrid et Circée. Nous étions alors en Février 2009. Et oui c’est presque comme une rencontre amoureuse. Je n’oublie pas ce jour de curiosité où Google m’a proposé un lien vers ce forum.
Très vite j’étais chaque jour sur le forum à la rubrique Humeur du jour. J’étais aussi fidèle en participations pour les différents défis. Ce sont des années en OR. C’était un espace créatif et amical intense. Nous nous inspirions, nous encouragions. Nous étions habité par la même énergie créative.
Très vite aussi, j’y ai eu des responsabilités, modératrice puis administratrice. On y organisait des concours qui nous tenaient tardivement devant nos tables de scrap et parfois encore plus devant nos écrans. Nous partions sur des imaginaires : les JO, Harry Potter, Les danses du monde…
En même temps….
Le terrain de jeu de notre créativité ne cessait de grandir. Il faut dire que nous étions bien aidé par un matériel de plus en plus facile à trouver (ou commander). Il y avait des marques françaises qui voyaient le jour.
C’est alors qu’une marque française bien chère à mon cœur (et pas qu’au mien) a mis des paillettes dans nos vies de scrappeuses : Kési’Art nait en 2007. Nous avions toutes au moins un produit de la marque de Laetitia. Et nous attendions toutes avec une véritable impatiente ses collections de papiers, si identifiables et si adaptées à notre créativité.
Ce n’était pas la seule marque française.
Mais elle a changé les mentalités: un scrap français était possible !
Nous avons inventé nos mots :
les CROPS : rencontre de scrappeuse autour d’un projet à réaliser, prestexte à se rencontrer aussi tout court.
les Duos se choisissent pour entretenir un lien plus fort (oups le nom m’échappe)
(NDLR: une amie m’a soufflé le mot NSP pour Not Secret Personne )
Et nous avons notre salon : Version Scrap
4 La diversification des styles et des applications du scrap
Désormais il n’ y avait pas un scrap mais des scrap(s).
Le scrap n’appartenait plus à une poignée d’initiés.
Il était devenu populaire.
Et les scrappeuses ne manquaient jamais d’idées.
Nous étions à l’heure du digital, et déjà certaines proposaient des produits digitaux à imprimer chez soi.
Le « project life » a vu le jour. C’est une variante du scrap avec des pochettes en plastiques souvent de la taille des photos. La spécialiste est Becky Heggins.
Le commerce en ligne français s’est développé.
En s’ouvrant au plus grand nombre, le scrap français a aussi affirmé un style bien à lui.
Des scrappeuses sont arrivées avec des univers créatifs forts. Certaines ont amené le textile, la feutrine (Merveilleuse Edwige Bufquin).
Pour d’autres le mix média était un merveilleux terrain de jeu .
ET certaines nous ont apporté toute la poésie et la délicatesse de l’aquarelle (petit clin d’œil à Cécile et Delphine).
Lors de notre salon « Version Scrap « , l’incomparable duo de Scrapbuttons nous offre Monumental Scrap ou le scrap en format XXL.Je dois bien dire que je venais à ce salon pour découvrir aussi cette exposition.
Et dans cette ambiance d’effervescence joyeuse, des créatrices françaises vont se lancer et créer leur marque. Quelle chance pour le scrap!
Désormais, il y a eu des produits qui nous correspondaient si bien. Je ne vais pas en faire la liste. Aujourd’hui encore, de nouvelles marques naissent.
Je crois que c’est à cette époque que je me suis vraiment retrouvée dans une famille de scrap tournée vers le storytelling et représentée par Ali Edwards
Je me suis épanouie dans le récit des jours ordinaires, dans le temps consacré à l’écriture autant qu’à la recherche de mise en page. Avec les nombreux défis et kits d’Ali, j’ai écrit les histoires de ma famille. C’est une richesse dont je suis très fière. C’est là, au fil du temps que mon scrap s’est affirmé, affiné.
5 Et aujourd’hui?
Le monde du scrap a changé, foi de dinosaure.
Désormais, il est facile de se procurer le matériel dont on rêve. Et c’est une vraie chance d’avoir un tel choix à disposition.
Il y a tant et tant de créations visibles sur le net pour inspirer et apprendre. Même si on peut regretter qu’une partie de la presse spécialisée du scrap n’ y ait pas survécu.
On peut aussi se retrouver autour d’ateliers de plus en plus nombreux & variés. Les fameuses crop sont nombreuses et prennent des formes allant de la journée à un séjour de plusieurs jours.
Nous sommes bien plus nombreuses et nombreux à partager la même passion… et c’est heureux!
Alors …. est-ce enfin le meilleur des mondes?
Je regrette que le scrap ne soit encore vu comme un loisir créatif réservé à des spécialistes. A la base, le scrap est toujours et simplement du collage et du découpage. Mais souvent, il est présenté dans des versions techniques qui nécessitent quelques pratiques ou outillages.
Le scrap est toujours accusé de coûter cher. L’offre est désormais très importante. Les marques proposent plusieurs collections par an. C’est toujours très tentant car ce sont des produits toujours en adéquation avec l’air du temps et nos attentes. Aujourd’hui, nous pouvons vraiment dire que nous avons une proposition commerciale qui nous corresponde vraiment.
Le scrap d’aujourd’hui ne rime plus avec forum. Les talents sont presque tous partis composés les DT (=design team) des différentes marques. Ou ces mêmes talents essayent de vivre de leur passion à travers l’animation d’atelier ou la production de kits. Nous avons non seulement des collections de papiers pensés pour nous mais des créatrices qui nous proposent des projets pour excercer notre créativité.
A l’opposé, il est difficile aujourd’hui de faire vivre des blogs/forums participatifs. La vie du scrap est ailleurs désormais, à l’abri des groupes FB de chaque marque. Et de quelques forums qui résistent comme de vaillants gaulois.
Et à titre très personnel, je regrette que le journaling, qui nous pousse à jouer des mots pour raconter nos histoires, soit le grand perdant de ce scrap plus commercial.
Au moment de choisir un titre un message, il est plus esthétique, plus facile de choisir un joli tampon texte ou un sticker au design harmonieux. Nous y avons perdu je crois une partie de l’enjeu du scrap: raconter nos vies, nous relier à nos émotions.
Heureusement une communauté résiste…. qui attache toujours autant d’importance
à l’écriture d’un titre personnel,
d’un texte manuscrit.
C’est certes plus engageant mais le témoignage est alors juste un peu plus … fort & émouvant.
Pour ne pas finir sur cette note très « dinosaure », je te dirai juste qu’il est formidable de vivre le scrap aujourd’hui et que je te souhaite de le vivre avec la même passion que celle qui m’anime depuis presque 20 ans.
C’est cette passion qui est aussi au cœur du projet d’Agnès vous raconte.
Raconter vos histoires avec des mots choisis.
Offrir une chance à la mémoire, aux jolis souvenirs, à ce qui fait notre héritage.
Partager un scrap ouvert à tous qui met sur le même plan écriture et scrap.
Longue vie au scrap
agnès
Déjà 20 ans que tu nous montre tes pages toutes plus belles les unes que les autres
Moi j’ai un peu abandonné le scrap…
Bonne continuation
Bises
Pour moi ca fait 16 ans que je scrap …. et parmoment j’ai besoin de ce journaling pour y mettre des mots … par contre je vois la différence entre le scrap francais qui est resté tres francais et le scrap allemand qui n’offre pas beaucoup de possibilité hormis pour les cartes utilisant beaucoup l’anglais. Et je suis duper heureuse d’avoir fait ta connaissance…
Bravo pour les 16 ans !Super intéressante ta réponse margrit. Je me suis demandée si les autres pays avaient une évolution comparable. La suisse a eu la marque Feuille de papier. Peut-être l’Espagne ou l’Italie? Ah c’est dommage alors car je pense qu’une marque aurait trouvé sa place sans problème
Merci beaucoup Sylvie. C’est la faute au CC tout ça …. bon je plaisante. En fait, tu tiens un carnet de vos voyages je crois. j’imagine qu’il y a aussi des images, des collages … alors c’est du scrap, d’une autre manière
Cet article est passionnant pour moi qui e
A tenté le scrap en 2005-2006 puis qui a fait un peu de carterie puis a lâché totalement l’affaire avant d’y revenir il y a maintenant 2 ans et demi. J’ai été bluffée de voir comment cela avait évolué, j’ai découvert des marques françaises, j’ai appris le jargon, j’ai apppriy qu’il y avait des collections bref merci pour cette rétrospective qui m’a fait découvrir ce qu’avait été le scrap de ses balbutiements a nos jours.
Meri à toi pour ton retour. Et je suis heureuse si tu y trouves désormais ton bonheur . C’est vrai que le choix est grand désormais et qu’on trouve tous les styles ou presque
Merci pour cette rétrospective. Cela fait 15 ans que je scrappe (j’ai eu une longue pause en matière de création par manque de temps mais j’ai continué à fréquenter de temps en temps certains forums et régulièrement des groupes Fb. J’ai aussi continué d’acheter du matériel). Je suis en Belgique et il y a 15 ans, on ne trouvait vraiment pas grand chose ici en magasin. À l’époque je n’avais pas la possibilité de faire des achats en ligne. Je me rendais de temps en temps chez Pipoos à Maastricht ou je trouvais un peu plus de matériel, surtout pour la carterie.
J’ai aussi été modo et co-admin sur des forums, j’y ai fait de chouettes rencontres et beaucoup d’amitié virtuelle s’est créée.
Je me souviens de ma joie immense quand j’ai découvert les premiers tampons en français !
C’est déjà un longue et belle histoire pour toi.Comme beaucoup le scrap n’est pas qu’un loisir. IL nous a donné des amies et c’est génial . Existe-il des marques belges?
Que de souvenirs ! La liste de Juliette, La fabrique, Version scrap ….. j’ai débuté en 2005 avec un album pour ma filleule. Que de changements depuis !
J’espère que ce sont des bons souvenirs pour toi. déjà 15 ans de scrap pour toi , une belle histoire
Joli article qui nous entraîne dans un flashback collectif teinté de nos expériences personnelles… On a tous, je pense, cherché à compléter d’un petit bout les phrases que tu as écrites avec nos propres souvenirs ou moments de révélations…
Merci pour l’évocation de notre duo SCRAPbuttons et du concept Monumental Scrap, Peu après Kesi’art avec qui nous adorons travailler, c’est un grand honneur…
Oh merci de ce message. Je suis heureuse si cette rétrospective t’a fait voyagé dans tes souvenirs perso. Nos souvenirs de dinosaures du scrap sont plus émouvants que des listes de dates. Vous êtes l’histoire du scrap et merci pour tout ce que vous y avez apporté… à moi et à tant d’autres.